Rennes, la mémoire de l’eau entre Ille et Vilaine

À bord d’un bateau électrique de L’embarcadère. En arrière-plan, le Belvédère de Ronan et Erwan Bouroullec.

Notre base la plus proche : Redon

Comme bien des villes d’Europe, Rennes (Ille-et-Vilaine) s’est d’abord développée près de ses cours d’eau, la Vilaine et l’Ille, et nourrie d’eux. Puis la Vilaine et ses crues sont devenues un danger. Ille et Vilaine ont été canalisées, domptées, aménagées. Puis oubliées. Aujourd’hui, comme bien des villes d’Europe, Rennes redécouvre ses voies d’eau, le plaisir bucolique de flâner sur les berges et sur l’eau ainsi que l’intérêt de disposer, en plein cœur de ville, de la présence des bateaux, qu’ils soient commerciaux, logements ou de plaisance. Rennes, préfecture de la Région Bretagne, est la ville de la confluence, la Condate Riedonum des Gallo-Romains. Dans cette grande cité de 216815 habitants au cœur d’une métropole de 447429 habitants, l’eau est pourtant si discrète qu’il est possible de traverser la ville sans la voir.

L’ancienne écluse de la chapelle-boy

C’est qu’à Rennes, l’Ille comme la Vilaine ont été canalisées, et la Vilaine détournée, recouverte. Ce contrôle strict imposé depuis des siècles aux cours d’eau ne rend que plus passionnant, plus émouvant le nouvel intérêt des Rennais pour leur fleuve et leur rivière.

Plan des voies navigables de Rennes

1 Les p’tits bateaux
2 Service des voies navigables de Bretagne
3 restaurant Essentiel
4 chambres d’hôtes Castel Jolly
5 restaurant Origines
6 Œuf La crêperie
7 restaurant Stoïque
8 couvent des Jacobins qui abrite le centre des congrès et l’office de tourisme de Rennes métropole
9 hôtel Le Magic Hall
10 crêperie La Rozell
11 les portes mordelaises
12 Pierre, restaurant de copains
13 belvédère Bouroullec
14 Café du port

15 chapelle St-Yves
16 chambres d’hôtes Marnie & Mister H
17 jardins flottants
18 fresque de Marie Bouilloud
19 Garden Hôtel
20 ancienne maison du mosaïste Isidore Odorico
21 Les Grands moulins de Rennes
22 Hôtel de Nemours
23 La criée
24 restaurant La Petite Ourse
25 restaurant Les Bricoles
26 L’embarcadère
27 Roazhon Park
28 gare S.N.C.F.
29 Plages de Baud
30 ancienne écluse de la Chapelle- Boby

Un fleuve canalisé, recouvert, détourné…

Les Grands moulins de Rennes.

La canalisation du fleuve Vilaine dans la traverse urbaine a été envisagée dès le XVIIIe siècle, après le grand incendie qui ravagea près de la moitié de la ville en 1720. Le fleuve est alors le territoire des tanneurs, des fabricants de parchemin et des moulins. Il sépare la ville en deux et sort régulièrement de son lit pour inonder toute la rive gauche. Mais la canalisation n’interviendra finalement qu’au milieu du XIXe siècle. Plusieurs bras sont comblés, la ville basse, en rive gauche, assainie. Dans les années 1910 d’abord, puis 1960, la Vilaine est partiellement recouverte dans sa traversée du centre- ville. La dalle qui la dissimule désormais accueille un parking et un nouvel espace urbain, la place de la République.

Après la grande inondation d’octobre 1966, les Rennais chassent encore un peu plus la Vilaine de la ville en la détournant partiellement. Son ancienne emprise, à l’est des quais Dujardin et Richemont, est encore lisible dans les alignements d’arbres de l’avenue Aristide-Briand. Dans la continuité de ces alignements, se trouvent les vestiges de l’ancienne écluse de la Chapelle-Boby, aménagés en 2013 près du pont de Strasbourg, qui témoignent du comblement, à partir de 1911, de l’ancien canal du Gué de Baud. Le 2d cours d’eau rennais, l’Ille, est canalisé au début du XIXe siècle pour créer le canal d’Ille-et-Rance, qui, avec le canal de Nantes à Brest, fait communiquer par l’intérieur de la Bretagne les différents arsenaux des côtes bretonnes à une époque où l’ambiance est plutôt fraîche avec les Anglais. Dans sa partie rennaise, le canal est appelé canal St-Martin.

La fresque de l’artiste plasticienne rennaise Marie Bouilloud.

… mais un fleuve retrouvé

L’ancienne maison du mosaïste Isidore Odorico.

Après tous ces bouleversements, il demeure néanmoins encore à Rennes un réseau de cours d’eau qui se rappelle agréablement, depuis une dizaine d’années, à la mémoire des Rennais. Faisons un petit tour d’amont en aval, d’est en ouest, sur cette Vilaine urbaine. À l’est du centre-ville, les bords de la Vilaine sont en plein aménagement. Un nouveau quartier sort de terre et les Plages de Baud, inaugurées en juin 2019, offrent aux habitants un lieu de détente près de l’eau, avec des pontons de bois, une plage et une cale de mise à l’eau pour les canoës et les kayaks. Plus en aval, le bras navigable de la Vilaine et un autre de ses bras, longé par la promenade piétonne des Bonnets rouges, forment une presqu’île qui abrite la Petite Californie. Ce quartier tient son joli nom d’une moche histoire de spéculation financière : au XIXe siècle, des notables, persuadés que la gare devait s’installer là, y avaient construit de belles maisons avant de voir leur rêve ferroviaire s’éloigner vers le sud de la ville. Ils se sont retrouvés le bec dans l’eau, alors que, comme les chercheurs d’or qui affluaient en Californie, ils avaient cru toucher le gros lot. Ce quartier est aujourd’hui un bien agréable lieu de balade. Il abrite de belles maisons et la passerelle dédiée au mosaïste Odo-rico. Les moulins de St-Hélier, ou Grands moulins de Rennes, une minoterie construite sur un bras de Vilaine à la fin du XIXe siècle, sont toujours en activité.

Confluence avec l’Ille-et-Rance et “vraie” confluence

Encore un peu plus en aval, à l’ouest de l’avenue Aristide-Briand, la Vilaine rejoint son lit d’origine. Ces retrouvailles ont lieu sous une fresque ensoleillée de l’artiste plasticienne rennaise Marie Bouilloud. Un espace détente a été installé là en 2020. Quelques centaines de mètres plus loin, la Vilaine disparaît ! Le fleuve plonge sous la dalle de béton de la place de la République et demeure insoupçonnable sur quasiment 500 m. Combien de Rennais savent que la Vilaine coule sous leurs pieds quand ils attendent leur bus ou se donnent rendez-vous sur cette place éminemment centrale ? La Vilaine sort de terre à la hauteur de la place de Bretagne, juste avant sa confluence avec le canal d’Ille-et-Rance. Plus loin, au niveau du jardin de la Confluence ( «la vraie confluence » disent les Rennais), elle rejoint un bras de l’Ille avant de s’écouler lentement vers Apigné, Redon et l’océan Atlantique. Le début du canal d’Ille-et-Rance est marqué par la 1re écluse, l’écluse n° 1 du Mail, et, depuis l’an dernier, par un drôle de belvédère, assemblage poétique et lumineux de 16 petits moulins à vent imaginé et conçu par Ronan et Erwan Bouroullec. Cette œuvre permanente de 11 m de haut crée une place suspendue qui offre un point de vue inédit à 2,5 m au-dessus de l’eau, là où Vilaine et canal se rejoignent.

François Templé, fondateur des P’tits bateaux.

Découvrir la ville en bateau électrique

Deux sociétés de location de bateaux électriques permettent de découvrir la Vilaine et le canal d’Ille-et-Rance rennais, Les p’tits bateaux, 48 canal St-Martin, et L’embarcadère au 61 quai St-Cyr. Les p’tits bateaux sont installés sur le canal de l’Ille-et-Rance, non loin du parc des Prairies St-Martin. Ce parc naturel de quelque 30 ha occupe tout l’espace entre le canal et un bras naturel de l’Ille, avec observatoires à oiseaux, aires de jeux, arboretum et vaches Highland les cheveux dans les yeux. L’entreprise Les p’tits bateaux a été créée par François Templé, professionnel des grands festivals musicaux, en 2019 : « En juin et juillet, c’était la Coupe du monde de football féminin au Roazhon Park, je proposais des navettes entre le quai St-Cyr et le stade.

L’embarcadère au 61 quai St-Cyr.
En famille et en bateau électrique devant l’écluse St-Martin du canal d’Ille-et-Rance.

Les gens pilotaient eux-mêmes. Cela a été un très beau départ ! » Depuis, les Rennais empruntent, dès la belle saison, ses 8 bateaux électriques Ruban bleu pour 5 à 7 personnes. En amoureux ou en famille, ils viennent profiter du bar et de la guinguette, passer les écluses vers le canal bucolique ou collecter les sensations, surprises et frissons garantis par le loueur, en naviguant sous la place de la République. Dans les mois qui viennent, F. Templé prévoit d’organiser des concerts sur une scène flottante et d’amener en bateau les spectateurs jusqu’au lieu de concert. Le 2d loueur, Alexis Laforge, a créé L’embarcadère en juillet 2020 sur la Vilaine. Il propose, en plus des kayaks et des paddles, 4 Ruban bleu électriques pour 5 personnes et 2 bateaux en aluminium, également électriques, pour 5 et 8 personnes. Ces derniers sont fabriqués, pour la coque, au chantier naval Bord à bord de Plestin-les-Grèves (Côtes-d’Armor) et aménagés par A. Laforge. Bateaux et kayaks sont là aussi pris d’assaut dès que le soleil pointe son ne, « ce qui arrive au moins une fois par jour tous les jours de l’année », parole de Breton entendue à L’embarcadère.

Où s’amarrer à Rennes ?

Sur la Vilaine, la halte publique du quai St-Cyr, équipée de bornes eau et électricité, est aujourd’hui occupée par les bateaux-logements et bateaux activités. Mais il est encore possible de s’amarrer plus à l’aval sur ce même quai, après le pont Malakoff, sur un linéaire de 62 m de long. En 2022 ou 2023, ce linéaire, qui accueille déjà la société de location de bateaux électriques L’embarcadère, devrait être aménagé en une halte fluviale. Sur la 2de halte publique, quai du canal St-Martin, sur le canal d’Ille-et-Rance, 6 places visiteurs sont disponibles, sans services. À 200 m en amont du quai, en rive droite, un ponton de bois long de 14 m dispose d’une borne eau et électricité au pied des locaux du Service des voies navigables de Bretagne (Région Bretagne. Enfin, il est possible de s’amarrer sur un linéaire de 93 m à l’aval du pont de la Barbotière, boulevard René-Laennec. Une borne eau et électricité y est disponible. Tous ces emplacements, ainsi que l’usage des bornes, sont gratuits,

Souvenirs de lavandières et jardins d’eau

Le “ventre de la baleine” s’annonce.

Naviguer, dans le plus profond silence, dans le “ventre de la baleine”- le surnom que donnent les Rennais initiés au tunnel sous la place de la République – à bord des bateaux électriques est un des grands moments de la découverte de la ville. Le tunnel est sombre sous son immense cage thoracique de béton, un contraste frappant avec la place de la République qui surgit à la sortie du tunnel, ses passants, ses bus, sa rumeur profonde de grande cité. La ville a alors un bien étrange visage vue depuis le fond de la Vilaine canalisée. Les hauts murs qui contiennent le fleuve accueillent, ici, un escalier qui permettait de charger et décharger les bateaux et donnait accès aux bateaux-lavoirs disparus, là, d’étranges ouvertures dans l’épaisseur du quai.

Ces larges bouches juste au-dessus de l’eau sont les entrées de souterrains qui communiquaient avec le sous-sol des belles maisons voisines. Les domestiques venaient y laver le linge et y puiser l’eau. «La journaliste Louise Bodin, qui habitait quai Lamennais, a écrit au début du XXe siècle qu’elle entendait les matins d’hiver, sous les quais de Vilaine, les blanchisseuses casser la glace pour laver le linge avant de partir à l’usine », nous conte Gilles Brohan, responsable du service Rennes métropole d’art et d’histoire. Depuis 2018, 4 jardins flottants sont venus habiller le bas des murs des quais, adoucissant de leurs courbes et de leur végétation foisonnante les lignes strictes et verticales de la canalisation. Naviguer en bateau électrique est aussi un agréable moyen de découvrir les beaux bateaux, souvent patrimoniaux, amarrés sur le canal et le fleuve. Après les avoir admirés depuis l’eau, nous avons rencontré certains de leurs propriétaires. À tout seigneur, tout honneur, les plus anciens d’entre eux sont Moïse et La Lorraine.

Les domestiques venaient laver le linge et puiser l’eau dans la Vilaine via des souterrains qui communiquaient avec le sous-sol des belles demeures.

Un contrat de canal 2020-2026

Un contrat de canal élaboré en 2019 par la ville, Rennes métropole et la Région Bretagne réglemente et délimite les différents emplacements de stationnement de bateaux sur la Vilaine et le canal d’Ille-et-Rance sur le territoire de la ville de Rennes pour la période 2020-2026. Ce contrat est associé à un plan d’action pour organiser et aménager l’accueil des bateaux, plaisanciers, bateaux activités et bateaux-logements. La 1re action a consisté à permettre l’installation des 2 loueurs de bateaux électriques. La 2e action, liée à un appel à projets, vise l’accueil de 4 nouveaux bateaux activités quai St-Cast et quai d’Ille-et-Rance. Le contrat prévoit également la mise en place d’une halte fluviale équipée quai St-Cyr, avec une capitainerie flottante et des emplacements et bornes pour 6 bateaux ainsi que l’installation d’une borne à eaux usées et 2 bornes eau et électricité à la halte du quai du canal St-Martin. À plus long terme, le site d’Apigné, en aval de Rennes sur la Vilaine, qui dispose actuellement d’un slipway pour l’entretien des bateaux de la région, accueillera un port fluvial avec des emplacements à sec et à flot. Les études de faisabilité ont débuté au printemps 2021.

Les beaux bateaux rennais

La Lorraine

Moïse, amarré quai St-Cyr, appartient depuis 1987 à Toutou, doux surnom rennais de Fernand Touquet. Construit au chantier Libaudière frères et cie à Nantes (Loire-Atlantique) en 1892, ce chaland breton de 26,75 m de long et 4,57 m de large a été motorisé en 1903 pour transporter sable, charbon ou gravier. Il est abandonné dans les années 1970 et coulé par son propriétaire en 1987. F. Touquet sort le bateau de l’eau et s’attaque à la rouille de la coque. Dans le bateau qu’il met plusieurs années à restaurer, il aménage un logement qu’il occupe toujours aujourd’hui.

Le Moïse navigue régulièrement sur les voies d’eau bretonnes. La Lorraine, 26,60 m de long et 4,60 m de large, aurait été construite en 1884 sous la devise de Marguerite. « Il a 5 ans de moins que la tour Eiffel », annonce fièrement Philippe Crossouard, son propriétaire. Amarré sur le canal St-Martin, le chaland a été motorisé dans les années 1950 et a transporté lui aussi sable et charbon avant d’être coulé en 2005 à Taden, sur le canal d’Ille-et-Rance. Il y restera 8 ans, jusqu’à ce que P. Crossouard s’intéresse à son sort. L’aventure de sa sortie de l’eau en 2013, de son transport sur l’eau jusqu’à Rennes, de la découpe de la coque abîmée (« Il restait 1 m devant et 2 m derrière, avec un vide de 23 m au milieu » précise P. Crossouard) mériteraient à eux seuls un long article.

Philippe et Fabienne Crossouard nous racontent la folle épopée du bateau.

Théâtre, bureaux, salon de coiffure ou yoga à bord

Le salon de coiffure durable Mouch’ d’Anaïs Melaye.

Aux côtés de Moïse et de La Lorraine, d’autres chalands bretons, également anciennes sablières, ont attiré notre attention, Cénomans et Morgoat, entre autres. À leurs côtés, des bateaux plus récents proposent animations et activités. Parmi eux, la Péniche spectacle qui accueille la compagnie de théâtre du Pré perché à bord des bateaux L’arbre d’eau et Dame blanche. Les 2 bateaux sont amarrés au quai St-Cyr entre 2 voyages de spectacles itinérants. Sur le canal St-Martin, le Drôle Doizo vert kaki et noir de Stéphanie Marc voisine avec La Lorraine. Le bateau, long de 12 m et large de 3,40 m, est sorti des chantiers britanniques Hancock and Lane en 1976.

Il accueille le bureau de communication et design de S. Marc : « Je voulais sortir de l’idée du bureau fermé et je cherchais un lieu atypique pour mes clients qui sont eux aussi atypiques. J’ai d’abord pensé à un château d’eau. Mais cela a été un bateau. » Sur lequai St-Cast, un bateau construit en 2014 par le chantier C.N.A. Yachting à Quimperlé (Finistère) accueille le salon de coiffure durable Mouch’ d’Anaïs Melaye. Durable, car les eaux usées du salon sont soit traitées à bord, soit, pour les eaux de coiffure, pompées et évacuées par la route. A. Melaye privilégie des produits naturels biodégradables à 98 % et recycle également les cheveux, qui, compactés, iront absorber les hydrocarbures lors des marées noires.

Drôle Doizo abrite un bureau de design et de communication.

Bientôt un 2e bateau, du même modèle Alphée 2.0, construit par le chantier Laïta Sailing, toujours à Quimperlé, rejoindra le salon Mouch’. Ce nouvel établissement flottant accueillera le studio de yoga de Magdalena Musialek, professeure de yoga rennaise, ainsi que des activités de bien-être. Trois autres bateaux activités, un bistrot dans un ancien chaland breton, une crêperie et un bateau événementiel, les rejoindront bientôt, sur le quai St-Cast et le quai d’Ille-et-Rance qui lui fait face.

Les maisons à pans de bois

Après ces longues promenades au bord de l’eau, il est temps de partir à la découverte des belles places rennaises. L’une des plus connues d’entre elles est la place Ste-Anne, qui est aujourd’hui l’un des centres de gravité de la ville. Quelques-unes des nombreuses maisons à pans de bois des XVe et XVI e siècles de Rennes y répondent aux maisons à pans de bois (autrefois enduits) du XVIIe siècle et au couvent des Jacobins. Cette bâtisse du XIVe siècle, qui a été entièrement restaurée après avoir servi de caserne de la Révolution à 1995, abrite le centre des congrès ainsi que l’office de tourisme de Rennes métropole. En façade du couvent, Revolving History, une œuvre de Laurent Grasso, anime d’un mouvement rotatif synchronisé les fenêtres en ogive. Jusqu’au 29 août 2021, le couvent accueille une centaine d’œuvres de 57 artistes issues de la collection Pinault. Place du Champ-Jacquet, les maisons à pans de bois du XVIIe siècle font face à des bâtiments de pierre. La place marque la limite atteinte par le gigantesque incendie qui ravagea la ville du 23 au 29 décembre 1720.

La place Ste-Anne.

Bonnes adresses d’hébergements

• Le Magic Hall, décoration originale, brunch et dîner, 17 rue de la Quintaine
• Hôtel de Nemours, chambres et appartements meublés, 5 rue de Nemours
• Garden Hôtel, chambres et appartements meublés dans une maison ancienne, jardin intérieur, 3 rue Jean-Marie-Duhamel
• Marnie & Mister H, chambres d’hôtes dans une maison à pans de bois du XVIe siècle, terrasse, 3 rue du Chapitre
• Castel Jolly, chambres d’hôtes dans un hôtel particulier classé, jardin, 15 rue de Brizeux

La Chrysalide de Sylvain Dubuisson (place Rallier-du-Baty).

Lors de la reconstruction, le choix a été fait de mêler, sur de nouvelles places, maisons à pans de bois et bâtiments neufs, plutôt que de reconstruire un quartier totalement neuf. Ce choix signe le caractère particulier d’un urbanisme rennais qui mêle et entremêle les époques architecturales. Sur la place Rallier-du-Baty, c’est une époque plus ancienne encore qui apparaît avec des vestiges des remparts médiévaux jusque dans le soubassement des immeubles, et la trace au sol d’une ancienne barbacane, un ouvrage de fortification en avant des murs. Sur cette place, se trouve la curieuse sculpture Chrysalide de Sylvain Dubuisson. En regardant par les petits trous de cette sculpture, le curieux aperçoit, dans une brume d’eau, les corps couchés de Tristan et Iseut.

Place du Champ-Jacquet.
Le couvent des Jacobins. La mise en mouvement de la surface dorée de l’œuvre de Laurent Grasso entraîne de superbes jeux de lumière et de reflets.

Des exécutions publiques aux fêtes étudiantes

Le samedi matin, c’est marché place des Lices !

Toutes ces places et rues, aux noms évocateurs
d’époques anciennes, la rue Pont-aux-Foulons, la rue des Innocents, sont piétonnes depuis les années 1980. C’est également le cas de la place des Lices, dont le nom évoque les barrières qui séparaient les concurrents des tournois de chevalerie. Depuis 1622, la place accueille le marché de Rennes, l’un des plus grands marchés d’alimentation de France. Ses quelque 300 étals s’installent, chaque samedi matin, en plein air et sous 2 grandes halles du XIXe siècle, qui ont bien failli être remplacées par des parkings à la fin des années 1970. La place est aussi le lieu de rassemblement des étudiants de la ville le jeudi soir. Il n’est pas rare que certains d’entre eux, certainement saouls, finissent la soirée juchés nus au somment de l’horloge qui orne la place.

Ils ne savent sans doute pas que cette horloge rend hommage aux dizaines de suppliciés qui ont souffert sur cette place, torturés, pendus, roués vifs, et leurs corps mis au pilori (à l’emplacement de l’horloge). Et tant mieux s’ils l’ignorent. À l’extrémité sud-ouest de la place se trouvent les portes mordelaises. Construites au milieu du XVe siècle, ces portes hautement symboliques -les ducs et duchesses de Bretagne les passaient avant leur couronnement dans la cathédrale St-Pierre – font l’objet d’un grand chantier de restauration. Leurs fossés et leurs abords accueilleront bientôt les jardins des Remparts et une promenade qui reliera, en 2023, la place des Lices à la place de Bretagne et au mail François-Mitterrand, tout près du début du canal d’Ille-et-Rance.

Les portes mordelaises, vestiges des remparts de Rennes.

Bonnes adresses de restaurants

• La Petite Ourse, restaurant bio local de saison, Bib Gourmand Michelin 2021, 48 bd de la Liberté
• Pierre, restaurant de copains, cuisine française originale, 33 rue Nantaise
• Les Bricoles, cuisine de bistro bar cocktails, 17 quai de la Prévalaye

• Œuf (On est une famille) La crêperie, classiques bretons revisités, 38 rue de St-Malo
• Stoïque, cuisine végétale gourmande, 13 rue d’Antrain

• Origines, bistro-microbrasserie dans l’ancien hôpital de l’Hôtel-Dieu, 2 rue de l’Hôtel-Dieu
• Essentiel, gastro mais abordable, au bord du canal St-Martin,11 rue Armand-Rebillon


La chapelle St-Yves.

Rive droite, rive gauche

Notre prochaine étape est la rue St-Yves, toujours sur la rive droite de la Vilaine. S’y trouvait autrefois un hôpital dont il ne demeure aujourd’hui que la chapelle. Cette chapelle gothique duXVe siècle, dédiée à St-Yves, a accueilli un temps une quincaillerie. Les réfrigérateurs et gazinières ornaient son parvis, et sa porte était renforcée d’un rideau de fer. L̵édifice fut ensuite le siège de l’office de tourisme jusqu’en 2019. Face à la chapelle, se trouve le Café du port. Ce nom est le seul vestige d’un ancien port sur la Vilaine. La rive droite de la Vilaine a été, jusqu’à la canalisation du fleuve, le centre administratif et le lieu de résidence des notables, protégés par des remparts au Moyen Âge ; tandis que la rive gauche, soumise aux inondations, était le territoire des abattoirs (les animaux à tuer étaient stockés dans la rue du Champ-Dolent), des fabricants de par-chemins ou des tanneurs, tous métiers liés à la présence de l’eau et créateurs d’insalubrité. Quartier populaire jusqu’à la canalisation, la rive gauche fait aujourd’hui partie intégrante du cœur de ville avec des centres de gravité forts, comme la gare et l’esplanade Charles-de-Gaulle, qui rassemble un multiplexe cinématographique, Les champs libres (bibliothèque métropolitaine, Espace des sciences, musée de Bretagne et café) et les 2 principaux centres commerciaux du centre-ville.

La rive gauche, c’est aussi La criée, un centre d’art contemporain installé dans d’anciennes halles, une librairie indépendante qui multiplie les rencontres avec des auteurs, ou encore la place de Bretagne et ses 4 fontaines aux baigneuses dont les corps nus sont recouverts de peinture automobile bleue, jaune, brune et verte. L’ancien et le moderne, l’art et l’industrie, le classicisme et l’avant-garde…

Les parcs du Thabor et Hamelin Oberthür

Le parc du Thabor étend sur 10,6 ha ses parterres à la française, son jardin à l’anglaise, les larges pelouses du carré Du Guesclin et un immense jardin botanique. D’abord jardin des moines de l’abbaye St-Melaine, le jardin fut ouvert au public, mais uniquement aux hommes (!) au milieu du XVIIIe siècle. Le jardin est aujourd’hui municipal et tous et toutes peuvent découvrir ses mosaïques florales, les serres, l’orangerie, la roseraie, les volières et la superbe cascade du Thabor.

Également en centre-ville, le parc Hamelin Oberthür, aménagé au XIXe siècle, comprend l’ancienne imprimerie Oberthür, une très grande pièce d’eau, des espaces boisés, des arbres remarquables, une grotte et des prairies. Une exposition d’animaux sculptés dans des troncs de bois anime le parc, qui est également équipé pour les pique-niques : une plancha, à télécommander depuis son téléphone portable, y est en libre-service.

Rennes est une grande ville, la plus grande de la Région Bretagne, la 11e commune la plus peuplée du pays et l’une des 21 métropoles françaises. Mais sa configuration, ses quartiers bien reliés entre eux marqués par des places qui toutes ont leur caractère, ses maisons à pans de bois, sa population très jeune, ses beaux parcs urbains, ses 2 cours d’eau, ses cha-lands bretons, ses bateaux électriques et ses kayaks en cœur de ville en font une ville particulièrement facile, vivante et douce à découvrir, et sûrement aussi agréable à habiter, en particulier sur l’eau à en croire les habitants des bateaux qui m’ont accueillie dans leur grande cité bretonne, leur petit paradis sur le canal d’Ille-et-Rance ou la Vilaine.

Place des Lices, une horloge rend hommage aux condamnés exposés au pilori, généralement le samedi, jour du marché, jusqu’au milieu.

Dormir à bord d’Armor

Pour ceux qui sont venus sans bateau et veulent néanmoins dormir à bord, le gîte Armor est la bonne adresse. Installé dans un chaland breton de 1912 à l’écluse de Grugedaine (Chevai-gné), sur le canal d’Ile-et-Rance, à 15 km de Rennes en voiture et un quart d’heure en train, le gîte pour 6 personnes comprend 3 cabines avec lits doubles, dont une avec baignoire et douche. Philippe Hubert, l’éclusier de Grugedaine, et son épouse Babeth accueillent leurs hôtes à quai en attendant de pouvoir naviguer sur les voies d’eau de Bretagne à bord de leur bateau.

Texte et photos Virginie Brancotte

Notre base la plus proche : Redon